Une sonnerie épouvantable m’extirpe des bras de Morphée avec une violence inouïe. Quelle idée de garder en service ce vieux téléphone des années 70... Les yeux encore collés, je tâte à ma gauche pour voir si la sublime créature de la veille ne s’est pas volatilisée. Elle est toujours là, et ce putain de téléphone n’arrête pas de sonner. Ça n’a pas l’air de perturber mon invitée. Je profite de son sommeil pour me rincer le gosier avec un fond de whisky et allumer une clope, le petit-déjeuner des champions. Les rayons de soleil qui passent à travers le store laissent apparaitre un spectacle satisfaisant : des emballages de capotes vides se mêlent aux roses déjà noircies par une nuit sans eau, la bouteille de sky est habillée de dessous de dentelle jetés à la va-vite, plusieurs cendriers éparpillés ici et là pleins de mégots et autres mixtures épicées. Cette chambre d’hôtel respire le plaisir et la sensualité. Je m’allonge sur le dos en prenant soin de ne pas réveiller la demoiselle. Les yeux rivés au plafond, je tire une taffe. La vie est belle, et non, je ne décrocherai pas ce putain de téléphone.